Je suis née au Brésil en 1984 où j’ai vécu jusqu’à mes 21 ans, avant d’intégrer l’école des Beaux-Arts de Quimper en 2005. J’ai obtenu mon DNSEP en 2009 et depuis j’habite et travaille à Rennes. Depuis ma sortie de l’école, le dessin est le fondement de mon travail. Une pratique quasi quotidienne s’est installée. J’ai toujours été très attachée à la notion de « gambiarra » qui signifie en brésilien un acte d’ajustement, d’improvisation, de transformation pour trouver une solution à une problématique. J’expérimente les formes et les matières avec des outils assez précaires qui avec le temps se sont imposés naturellement : toute sorte de feutres, des crayons de couleur, de la gouache, des colles pailletées, des autocollants, des photos de magazines découpées, de l’aquarelle, des encres, du blanco d’écolier et d’autres choses trouvées par hasard chez moi ou au supermarché. Le dessin flotte entre le collage, la peinture et la sculpture. Les frontières deviennent floues.
Dans mes dessins, il y a un jeu constant entre les vestiges de mon enfance, la culture brésilienne et les choses que j’observe et que j’absorbe dans la réalité qui m’entoure. Les sujets apparaissent comme des images mythologiques qui se forment à partir d’un lien étroit que je construis avec mon inconscient. Là, il y a un langage et une langue qui parfois m’échappent.
« (…) Soudain les choses n’ont plus besoin d’avoir de sens. Je me contente d’être. Vous êtes ? J’en suis sûr que oui (…). » Clarice Lispector, fragment du livre Un souffle de vie.
Ce qui m’intéresse dans cette recherche, ce sont les rapports inattendus qui surgissent entre des formes imaginaires et des figures inspirées de mon quotidien. Ainsi est venue aussi l’expérimentation de l’écriture, une forme qui me permet d’approfondir et d’explorer d’autres possibilités poétiques.
Comme un dessin, un texte est souvent né d’un désir de nommer quelque chose qui me titille et des sentiments d’étrangetés qui me parcourent. Regarder le monde, les paysages, les corps. Écouter des mots, des choses qui arrivent au hasard dans la vie de tous les jours. Ces mêmes choses qui viennent exciter la pensée, troubler l’intime et qui me poussent dans une quête de sens.
Un sens qui puisse évoquer mes utopies, des fictions que je m’invente, parfois dramatiques, ironiques. Le travail tisse finalement un ensemble qui témoigne de mon rapport au réel. Décrire parfois simplement ce réel-là, et en d’autres temps les transformer aussi, comme un acte de création-digestion.
Manoela Prates
